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Portrait à voir

Basile Yawanké en toutes premières fois

Interview

C'est à l'université de Lomé au Togo, où il étudie Les Sciences du Langage que Basile Yawanké arrive au théâtre. Il se forme à travers des stages, au Togo et en France. À partir de 2014, il participe comme metteur en scène au laboratoire de recherche artistique ELAN du festival les Récréâtrales à Ouagadougou. Il est co-fondateur de l’Ensemble Artistique Fako, l’une des structures artistiques les plus dynamiques au Togo. En France, il rejoint la compagnie Alyopa comme co-directeur. Il a été en résidence à la Maison des auteurs de Limoges pour son texte Les enfants hiboux ou les petites ombres de nuit qu’il présente en février 2022 au TU.

Quel est ton premier émoi de spectateur ? 
Ma première émotion de spectateur remonte à très loin, à mes années de primaire au Togo. J'étais en CE2. Mon meilleur ami de l'époque, avec qui j'étais dans la même classe, avait interprété avec brio, lors des semaines culturelles de l'école, le premier rôle dans une pièce. Je ne me souviens plus du titre du spectacle mais l'histoire tournait autour d'un instituteur qui arrivait dans un village où les parents étaient plutôt réticents à mettre leurs enfants à l'école et cet instituteur,  incarné par mon ami,  se dévouait à aller dans les familles pour les sensibiliser. C'était la première fois que je voyais une scène ou un sketch ou un spectacle vivant ; en tout cas quelque chose qui s'apparentait à du théâtre. Je ne sais pas si c'est parce que c'était mon pote qui y jouait mais j'avais été scotché au spectacle, complètement embarqué avec mes amis.
Je pense que cette expérience a été un des premiers déclics vers le théâtre. Car pendant les vacances, mon meilleur ami qui jouait ce premier rôle est gravement tombé malade, grosse anémie et est décédé suite à cette maladie car ses parents n'avaient pas voulu que les médecins lui fassent une transfusion sanguine. Je me suis donc dit qu'un jour je jouerai comme lui. Et il m'arrive de penser à lui à chaque fois que je m'engage dans un nouveau projet théâtral.
 

À quand remonte la première fois où tu as voulu être metteur en scène ? où tu as voulu faire du théâtre ?
La première fois que j'ai mis en scène remonte, je crois, à 2008 ou 2009. À la sortie de l'université de Lomé (Togo) je me suis vu confier la troupe de théâtre de l'université. Et la première fois que j'ai voulu faire du théâtre, outre l'expérience citée ci-dessus, remonte à mes années de collège. Je crois que j'étais en 5ème ou en 4ème. Il faut dire que je n'avais pas vraiment eu le choix. J'étais responsable d'une troupe de théâtre qui devait devait participer à un concours sur une thématique environnementale. Un jour après un filage, le professeur m'a demandé de faire un retour de la répétition. Puis il m'a dit : « tu reprends le rôle ». Voilà ! C'était mon baptême au théâtre.
 

"Les enfants hiboux ou les petites ombres de nuit" c'est le premier titre auquel tu as pensé pour ce spectacle ?
Oui ! J'ai pris beaucoup de temps de réflexion, comme d'ailleurs sur la plupart des titres des projets sur lesquels je travaille. Mais une fois que c'était trouvé ce titre m'est apparu comme une évidence. Il est resté longtemps comme titre provisoire mais aucun autre n'a pu le détrôner.

Plusieurs réflexions m'ont conduit vers ce titre. Je voulais parler avant tout de ces enfants au vécu particulier. Donner la parole à ces jeunes pousses qui sont l'avenir d'une société, de l'humanité, sur qui devait être portés une attention particulière, un éclat de la lumière pour un épanouissement serein. Malheureusement ils sont mis au banc de cette société. Rejetés, et taxés de tous les maux, et de tous les noms d'oiseaux, ils se retrouvent dans les rues et y dorment pendant la nuit.

Même si le hibou est un bel oiseau, en tout cas de mon point de vue, il est considéré comme un animal maléfique en Afrique. Il vit dans la nuit à l'instar des sorciers qui ''opéreraient'' dans l'opaque densité du noir nocturne.

Considérés comme des tâches dont il faut se débarrasser, les enfants taxés de sorciers sont craints par la société. Ils sont rejetés par celle-ci, car accusés d'agir dès que tombe la nuit pendant que dorment ''des âmes pures et innocentes''. Un mythe véhiculait que les sorciers pour agir dans la nuit se transforment en hiboux afin de voler plus facilement de concession en concession.

La première date d'un spectacle, ça met dans quel état ?
Toujours fragile et stressé. C'est la première fois que ce bébé artistique rencontre un public et on a aucune idée de la réception qui lui sera faite.

→ Les enfants hiboux ou les petites ombres de nuit I Basile Yawanké - fév.  2022  en coréalisation avec le Grand T