Le Nantais Quentin Ellias présente Mamma, deuxième création en tant que metteur en scène et seul en scène mélangeant de façon maligne les cartes du double je(u) et déclaration d’amour à sa… mamma.
Par Arnaud Bénureau
Rencontrer Mamma, celle de Quentin Ellias, « comédien qui fait de la mise en scène », comme il se définit lui-même ; c’est d’abord être agile avec un Google Agenda. En effet, la deuxième pièce du Nantais est un chamboule-tout de dates diverses et variés. La première, en 2016, est à en tomber de sa chaise… Ou plutôt de son divan en l’occurrence. « À la fin de la séance, nous raconte-t-il dès le début de notre rencontre, mon psy me dit qu’il faut tuer ma mère ». Oui, et ? « Il est parti à la retraite juste après. C’était extrêmement déroutant. » De cette phrase naît donc Mamma. Enfin pas tout à fait. Les racines de ce seul en scène, convoquant à la fois la grammaire du stand-up, les réflexes de la performance et les codes du théâtre, vont chercher encore plus loin. « En CE2, la maîtresse nous demande d’écrire une rédaction sur notre idole, la personne qui nous inspire le plus. » Évidemment, et sans surprises désormais, Quentin Ellias écrit sur sa mère.
Nous voilà maintenant à faire un grand bond en avant. Nous sommes en 2017 et Quentin Ellias, déjà vu chez les chorégraphes Olivia Grandville et Laurent Cebe comme chez les metteurs en scène Hoël Duret, Colyne Morange et Tanguy Malik Bordage, donne une mini conférence au TU-Nantes. Mamma est née. Pas dans sa forme finale. Mais dans son énergie, dans son envie de brouiller les cartes du vrai, du faux, du réel, de la fiction. Le Nantais de 37 ans aujourd’hui se pose-là. Au croisement de tout cela. Et en plein cœur du poste. Celui de la télévision qui l’a accompagné pendant toute sa jeunesse à Bellevue. En effet, en 2021, encore une date, il participe au jeu télévisé Tout le monde veut prendre sa place, présenté par Laurence Boccolini, « la bad bitch par excellence. Avec ma mère, on l’adore. » Pour autant, Quentin Ellias n’y va pas comme un candidat lambda, mais comme un auteur en recherche. Cette matière première et inattendue va nourrir la réflexion. Car c’est ainsi, à travers le réel, à travers la vraie vie que le garçon construit son théâtre. « Je ne suis pas quelqu’un qui écrit. La page blanche m’angoisse. Alors pour y pallier, je recycle beaucoup d’audio, de vidéos… » Qui finalement donneront vie à 40 pages de texte où Quentin Ellias s’amuse, avec un certain sens du sérieux, à questionner le féminin, le masculin, les injonctions ou encore la place occupée dans la société.
Il aura fallu huit ans, COVID compris, pour que Mamma se présente à nous comme sur un plateau. « Avec le recul, ce temps a été nécessaire pour mûrir le projet, le créer dans de bonnes conditions et rencontrer les bonnes personnes. Aujourd’hui, c’est une immense joie de pour voir le raconter et de rencontrer le public. » Mamma, c’est celle de Quentin Ellias ; mais c’est aussi la nôtre tant la force de ce seul en scène est de s’échapper constamment du personnel et confidentiel pour célébrer une relation intime et universelle.
On prend date !
Arnaud Bénureau, Octobre 2025
