5 questions à Paul Garcin
Performeur et artiste plasticien passionné par la pop culture, Paul Garcin revient au TU avec Forever Mentone, une performance entre le vlog, le stand up et le concert.
Ce qui me plaisait plutôt, c’était l’idée d’incarner l’« artiste » tel que je me l’imaginais, en jouant avec humour de ses clichés. Et c’est exactement à cet endroit-là que l’art, en tout cas ma pratique, est nécessaire dans ma vie : elle me permet d’incarner mes fantasmes, de jouer avec et de les transcender pour mieux les déconstruire.
Paul Garcin
Quels sont les moteurs de la création de ton spectacle ?
Paul Garcin : Ce sont beaucoup de sentiments différents qui m’ont traversés au cours de toutes les étapes de cette aventure créative. D’abord le fantasme et l’idéalisation de la Californie, de sa culture et de ses habitants, qui m’ont poussé à tout mettre en oeuvre pour y retourner. Puis la frustration et la déception, qui ont été les sentiments « déclencheurs » : j’étais au fond de mon lit avec un covid corsé en décembre 2021 en train de faire le point sur ma vie depuis la sortie d’école d’art en tant que jeune artiste précaire à Paris. Et c’est ce jour-là que j’ai écrit le morceau d’ouverture du spectacle, « The Phase de Doute song ».
Qu’est ce qui t’agite à 30 ans (ou presque) ?
Paul Garcin : Beaucoup de choses et c’est parfois un peu intense dans ma tête, mais ça reste toujours autour des mêmes sujets qui m’obsèdent depuis des années : la musique, la pop culture et comment elle se raconte. La manière dont son storytelling dit toujours quelque chose de notre époque. Sinon l’amour et l’amitié aussi, les sentiments et les émotions en général, que j’apprends à mieux connaître, accueillir et maîtriser en grandissant. Puis l’expérimentation, essayer de nouvelles choses tout le temps.
Pourquoi l’art est nécessaire dans ta vie ?
Paul Garcin : Quand j’ai commencé les beaux-arts je me projetais surtout en tant que peintre ou sculpteur. J’avais une volonté de devenir artiste dans le sens cliché du terme : réaliser des œuvres pour le white cube, avec une certaine technique.. Mais je n’ai pas été admis en classe de peinture lors de ma première année aux Beaux-Arts de Nantes, et j’ai compris lors de ma deuxième année, en sculpture (« situation construire » à l’époque ), que je ne n’avais ni la virtuosité, ni l’habileté que j’espérais et surtout que tout ça ne m’intéressait pas beaucoup. Ce qui me plaisait plutôt, c’était l’idée d’incarner l’« artiste » tel que je me l’imaginais, en jouant avec humour de ses clichés. Et c’est exactement à cet endroit-là que l’art, en tout cas ma pratique, est nécessaire dans ma vie : elle me permet d’incarner mes fantasmes, de jouer avec et de les transcender pour mieux les déconstruire.
Je parle beaucoup de mes pièces avec ma psy aussi, surtout quand je les réalise. Souvent, au cours de la création je conscientise beaucoup de choses, puisque je pars toujours d’expériences personnelles. Je crois que ce spectacle en est un parfait exemple. J’y fais des deuils, j’y évoque mes doutes, et je raconte en direct sur scène toutes ces choses-là, ce qui me permet en un sens de les régler avec moi-même. « Tout ce qui est montré sera détruit. ». C’est Richard Mèmeteau qui écrit cette phrase dans son livre « Pop Culture » au sujet des talkshows américains qu’il voit comme « (…) la destruction, la purge qu’on opère en soi-même en transformant un élément de vie privée en un élément de vie sociale et publique ». Et je dois dire que je me reconnais beaucoup dans cette idée.
Comment tu imagines ta vie d’artiste en 2054 ?
Paul Garcin : Au vu des tendances politiques actuelles vis-à-vis de la culture, j’espère qu’il sera encore possible d’être artiste en 2054 ! Mais ce qui est sûr, c’est que je continuerai de rester créatif et de faire des projets si ce n’est pas le cas.
En 2054, j’espère continuer d’expérimenter et de prendre des risques dans mon travail. Continuer de comprendre mon époque aussi.
La dernière fois je voyais une photo d’Elton John et Chappell Roan, une jeune artiste que j’adore et je pensais à la manière dont Elton ou Madonna étaient à un moment de « transmission » dans leur carrière, en revisitant leur vieux tubes avec une génération d’artistes plus jeune. Musicalement, c’est pas toujours dingue mais je trouve l’intention belle, et j’espère moi aussi être en mesure de transmettre d’une manière ou d’une autre – peut-être par l’enseignement ? – à 58 ans.
Et le TU en 2054 ?
Paul Garcin : J’espère que le TU continuera de soutenir la jeune création comme il l’a fait pour moi et continue de le faire, c’est si précieux! Particulièrement avec l’ambiance politique actuelle qui ne cesse de s’assombrir.
-> Propos recueillis en août 2024.
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