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Portrait à voir

Qui es-TU Betty Tchomanga ?

Portrait d'un premier spectacle

Pour moi, la danse est liée au plaisir. Elle est reliée au changement d’état, à la transformation. Devenir autre. 

Au cours de la conversation, Betty Tchomanga lâchera cela comme ça. Comme si de rien n’était. Tranquille. « J’étais une bonne élève. J’ai fait un lycée général option scientifique. C’est après le Bac que j’ai bifurqué. J’étais inscrite en classe prépa et à la fois, je passais une audition au Centre national de danse contemporaine d’Angers. Tout avait marché. J’étais prise à Henry IV… »  Ah voilà, Betty Tchomanga n’était pas « une bonne élève», mais plutôt une jeune fille brillante. On n’entre pas dans une des meilleures classes préparatoires de France uniquement parce que l’on a vu de la lumière.
Malgré tout, celle qui a grandi dans un petit village du sud de la Charente-Maritime prendra la direction d’Angers et du CNCD, place forte de la danse contemporaine. « Le CNDC, c’était un peu un rêve. Je l’ai tenté sans trop y croire. Là-bas, je découvre un monde. Je vois des spectacles. Je rencontre des artistes. J’apprends l’histoire de la danse. Et tout cela stimule encore plus mon désir de danser ». Et aujourd’hui, qu’est-ce que la chorégraphe entend par danse ? Elle réfléchit longuement. On hésite à passer à autre chose. Et puis non… « Pour moi, elle est liée au plaisir. Elle est reliée au changement d’état, à la transformation. Devenir autre ». Et pour Mascarades, Betty Tchomanga devient – façon de parler – Mami Wata, « déesse des eaux, divinité associée au pouvoir, à la sexualité. « J’en avais entendu parler lors d’un voyage au Cameroun. J’étais intriguée par cette figure de sirène, mi-femme, mi-poisson. Lors d’un projet de mémoire, j’ai découvert les livrets de ballets écrits par Louis-Ferdinand Céline : Ballets sans musique, sans personne, sans rien. J’ai perçu une résonance entre la figure de la danseuse dans ces écrits et la figure de Mami Wata. Puis, j’ai appris que L-F Céline avait passé une année au Cameroun. L’histoire coloniale a potentiellement généré des influences des deux côtés. Je suis partie du postulat que L-F Céline avait pu être en contact avec la figure de Mami Wata et être influencé par ce mythe.» Ces recherches ont ainsi constitué « un bain de travail » pour la chorégraphe qui a développé ce solo, rythmé par une musique au carrefour de la culture club et des rythmes de musiques traditionnelles africaines, autour de la figure du saut. Cette dernière étant appréhendée dans Mascarades comme « une vibration, une pulsation » qui vous emporte aux frontières de la transe.
Aujourd’hui, Betty Tchomanga arrive sur le plateau du TU toute sirène hurlante. Comme si de rien n’était… 

Texte : Arnaud Bénureau